III. Période d’intolérance et fin de prospérité aux Etats-Unis

06/01/2015 09:32
 

1. La peur de l'étranger et du changement de la société

 
Les Roarings Twenties s’affrontent dans un système aux valeurs opposées : d'un coté la prospérité, le plaisir, la libération des moeurs, le progrès social et de l’autre l’appel de certains groupes de pressions pour un retour en arrière c’est-à-dire a des valeurs plus traditionnelles autour d'une morale protestante ; avant tout le travail et la famille notamment les WASP(Le terme de White Anglo-Saxon Protestant désigne l'archétype de l'Américain blanc favorisé, descendant des immigrants protestants d'Europe du nord-ouest, dont la pensée et le mode de vie ont structuré la Nation américaine depuis les premières colonies anglaises du XVIIe siècle). Expliquant bien un déchirement pendant cette période entre un retour en arrière pour certains et un bond en avant…
 
C'est pourquoi il est bon de revenir sur le rejet de l’autre, de l’étranger, celui qui met a mal le pays, l’aspiration de l’Amérique aux américains se diffuse peu a peu…
 
Cet américanisme se manifeste des le lendemain de la grande guerre avec la peur des red scare répondant d'une part a la révolution russe de 1917 voyant l'arrivée du bolchevisme au pouvoir et d'une peur de la propagation de ces idées qui changeraient a terme le mode vie américain déployant ainsi un fort courant anti-communiste. Deux anarchistes italiens, condamnés à mort en 1921 pour un double meurtre dans la banlieue de Boston, manifeste de l’état de ces tensions raciales et idéologiques ( L’affaire Sacco et Vanzetti est le nom d'une controverse judiciaire survenue dans les années 1920 aux États-Unis, concernant les anarchistes d'origine italienne Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti qui ont été condamnés à mort et exécutés. Leur culpabilité est très discutée aussi bien à l'époque que par la suite et plusieurs oeuvres artistiques leur ont rendu
hommage).
C'est pourquoi au début des années 1920 le Klu Klux Klan acquiert rapidement et spontanément du
pouvoir. Luttant pour la suprématie de la race blanche mais plus « moderne » c’est-à-dire ouvert à
tous les américains blancs protestants et conservateurs pour lutter contre le communisme, le
syndicalisme révolutionnaire, le socialisme la libéralisation des moeurs mais aussi le féminisme. La
montée du Klan commence en faite avec l’importante dépression économique de l’automne 1920 ou
des fermiers désespérés du sud des états unis ; organisés sous la bannière du KKK tentèrent de faire
remonter le prix du coton en restreignant les volumes mis en vente. Et durant l'automne 1920 et
jusqu’à l’hiver 1922 des bandes cagoulées écumèrent la campagne exigeant des entrepôts et des
sociétés d’engrenage du coton et ce provoquant ainsi le première engrenage du développement de
ce Klu Klux Klan.
Ici le défilé du Ku Klux Klan en 1928 à Washington

 

 

Le président Wilson, puis ses successeurs patronnèrent discrètement le Klu Klux Klan dans les années
1920, c’est aussi une explication de ce KKK « moderne » qui prend une ampleur considérable en
quelques années et ne concerne plus uniquement le Vieux Sud mais toute l’Amérique. Il apparaît
comme une « fraternité de masse », et en être membre est considéré comme une marque
de patriotisme. Comme exemple le nombre de membres : dans les années 1920, les membres du
second Ku Klux Klan sont estimés à cinq millions alors qu’ils n’étaient que 100000 au début des
années 1920 pour atteindre 6 millions de membres en 1926 ( apogée du KKK entre 1924 et 1926).Il
possède 75 millions de dollar ; rapidement, il devient donc une force politique influente avec laquelle
les hommes politiques doivent compter. En 1924 c’est l’apogée politique du KKK, la clan noyaute la
convention démocrate et élimine le candidat catholique. Le quartier général du second Ku Klux Klan
s'installa à Washington, plusieurs parades gigantesques furent même organisées dans la capitale (en
1924 ; 40000 hommes du clan défilèrent dans la capitale). Ses membres continuent de pourchasser
les Noirs, les immigrants, les catholiques, les juifs et tous ceux qui les côtoient et qui les aident.
Certains sont marqués au fer des trois lettres du Ku Klux Klan ( KKK ), d'autres sont badigeonnés de
goudron bouillant puis couverts de plumes comme de simples animaux et les campagnes de lynchage
aux branches des arbres se poursuivent. Toutes ces actions violentes font perdre le soutien de
certains responsables politiques mais clivent ainsi plus profondément les Américains puisque le
retour du KKK prône aussi un retour en arrière du fait de leurs idées, mais les «clientèle cible» du Klan
sont la petite bourgeoisie qui ne profite pas de la prospérité des années 20.
 
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A cela s'ajoute la Prohibition qui peut elle aussi tout a fait correspondre aux retour en arrière de cette société en pleine expansion économique et culturelle montrant ainsi un échec d'une solution trop radicale...
 
La Prohibition fait référence à plusieurs périodes de la première moitié du XXe siècle où la fabrication, le transport, l'importation, l'exportation et la vente de boissons alcoolisées a plus d'un degrés ( à quelques variations prêt dans les différents états des États-Unis) étaient prohibés dans certains pays décrété par le XVIIIe amendement de janvier 1919, complété par la Loi Volstead du 1er janvier 1920. Face aux changements économiques et sociaux profonds, un courant conservateur renaît, dans les années 1920, dans une partie de la population américaine. Un courant qui, incapable de comprendre les mutations de la société actuelle, cherche à lutter contre les influences néfastes de la modernité : le cinéma, l’automobile, les moeurs dissolues, le communisme… et l’alcool. Ainsi, la Prohibition est l’expression la plus connue de cette renaissance du conservatisme ( Certains mouvements radicaux tels le Klu Klux Klan prirent ouvertement parti en faveur de cet prohibition et également les WASP ).Les États-Unis se retrouvent divisés en deux : les États prônant la prohibition totale, les États dits « sec » (dry states) et les États ou la prohibition ne s’appliquait pas dits « humide » : wet states souvent repartis au Sud sec et au Nord humide.
 
Aux états unis il est donc désormais interdit de fabriquer de vendre ou d’acheter sur le territoire fédéral des boissons qui contiennent plus de 1 % d’alcool par le XVIIIe amendement de la constitution américaine pour combattre l’ivrognerie, lutter contre les injustices sociales et la corruption politique, voilà le programme des prohibitionnistes pensant qu’une Amérique saine reviendra. Les prohibitionnistes viennent plutôt du sud et sont plus ruraux qu'urbains ; ils se regroupent dans l’antisalon league . La prohibition porte avec elle des effluves de péché, de danger, de violence qui sont en fait des traits de caractère de la société américaine pendant les Roaring twenties, selon eux. 
Soulignant ainsi que l’interdiction fera augmenter la productivité, rappelant ainsi que l’alcoolisme est essentiellement une maladie de la société européenne. Face à cette situation, les forces de l'ordre furent donc chargées de détruire le matériel des distilleries et des brasseries afin de mieux contrôler l'entrée des marchandises aux frontières américaines. Les effets et conséquences de cette prohibition furent souvent inattendus... Ainsi, certains bars se reconvertirent dans les sodas ou les bières sans alcool...
 
Interdit, l’alcool a revêtu du jour au lendemain la saveur du fruit défendu c'est-à-dire d’un fruit qui nous est interdit mais qui justement nous donne encore plus envie de croquer dedans. Parce que les saloons étaient sordides, l’ivrognerie devint un vice de riches, phénomène encouragé par le renchérissement des prix de l’alcool clandestin. L’Amérique a donc vu fleurir en quelques mois des milliers de débits de boissons clandestines et une nouvelle industrie de production et de distribution
de l’alcool désormais prohibé, « le bootlegging » . 
Et parce que le goût pour l’alcool n’avait en rien diminué, on vit que le bootlegging n’était clandestin qu’en apparence : et fut, en fait, semi-toléré et en tous cas protégé par la corruption . Ce fut en effet une véritable industrie qui se développa très vite, couvrant toute la filière : la distillation, le transport, la distribution et la gestion des débits clandestins, ainsi que l’importation en provenance en particulier du Mexique, du Canada et de Cuba. Elle inclut même l’exportation, notamment à partir des ports de la côte atlantique. Parce que le développement de cette industrie exigeait des moyens considérables, les bootleggers devinrent des personnages tout-puissants.
C’est ce qui explique le développement massif de la criminalité organisée de type mafieux du fait de la Prohibition. Celle-ci engendra la naissance de gangs, véritables «syndicats du crime» aux nombreuses spécialités. Ces gangs contrôlaient un réseau d’usines clandestines, de points de distribution et de débits de boissons clandestins, reliés par des flottes de camions et de véhicules, contrôlées par une armada d’hommes de main armés jusqu’aux dents. Ils ne préexistaient pas à la Prohibition, mais en sont directement issus. C’est ainsi que le plus connu de ces gangsters, Al Capone, arrivé à Chicago des bas-quartiers de New York en 1920, succéda d’abord à John Torrio, lui-même chef d’un réseau de crime organisé spécialisé dans la prostitution, pour transformer ce gang en un tout-puissant syndicat du bootlegging, surarmé, dangereux et très organisé.
Ces gangs purent se maintenir en toute impunité grâce à la corruption massive des autorités locales.
Les mobsters contrôlent les élections locales, infiltrent l’administration et la justice, cherchent à étendre leurs tentacules jusqu’à la police fédérale. Maires, conseillers municipaux, policiers, juges, tous sont dans la main du crime organisé. Le maire de Chicago dans les années 1920, Big Bill Thompson, incarne jusqu’à la caricature la corruption des autorités municipales.
La Prohibition est la résultante de nombreux travers de la société et de la vie politique américaine, de l’évolution de l’immigration, de la condition ouvrière et aussi de la condition féminine au XIXe siècle, et des changements en profondeur de la société qui ont accompagné le grand boom économique de la fin du XIXe siècle.
 
Cette photographie montre le début de la Prohibition avec les tonneaux de fûts d’alcool en tout genre
qui sont déversés dans les égouts. 
 
Celle-ci montre la manifestation des Americain face à cette prohibition.
 
 
 
Nous parlerons plus précisément d’ailleurs de l'évolution de l’immigration avec la mise en place de lois de quotas qui étaient avant décrété sur la base de 1910 c’est a dire 3 % d'immigrés par nationalité sauf les nationaux d’Amérique latine. Puis en 1924 on met en place le Johnson-Reed Act nettement plus restrictif que le Quota Emergency Act puisqu'il interdit l'immigration des asiatiques sur le territoire des États-Unis et réduit les pourcentages à 2 % par nationalité montrant ainsi ce changement et cette intolérance qui fait revenir les États-Unis en arrière avec pourtant dans un même temps une prospérité économique très importante avec l'utilisation d'un quota qui date du recensement de 1890 prononçant ce repli identitaire des États-Unis...
Derrière ces nombreuses réminiscences culturelles se cachent en fait des traits de caractère essentiels de l’Amérique, et une réalité sociale, économique et culturelle qui traduit les mutations profondes des États-Unis à la fin du XIXe et au début du XXe siècle.
 
 

2. La fin des Roaring Twenties : La crise de 1929

La crise de 1929 arrêta net la prospérité de l'économie américaine et ainsi la période de croissance des Roaring Twenties. Cette crise apparaît le jeudi noir, qui est le jour du premier krach majeur, le 24 octobre 1929 ou 13 millions d'actions sont vendu en un seul jour. L'origine de ce krach est en fait lié aux bulles spéculatives des années 20 du fait d'une augmentation trop importante des cours boursiers, une hausse totale de 300 % en 9 ans.Selon l'économiste Jacques Brasseul, « le cours des titres augmente plus que les profits des entreprises, qui eux-mêmes augmentent plus que la production, la productivité, et enfin plus que les salaires, bons derniers dans cette course. »
Provoquant ainsi un élément spéculatif des le début de l’année 1928.L'économie, elle, montre des signes de faiblesse dès le début 1929 : ainsi, la production automobile chute de 622 000 véhicules à 416 000 entre mars et septembre. La production industrielle, elle, recule de 7 % entre mai et octobre. Ce ralentissement est en partie dû à un phénomène d'asphyxie : les capitaux disponibles accourent à la bourse plutôt que vers l'économie « réelle ».
 
Entre mars 1926 et octobre 1929, le cours des actions augmente de 120 % et les premières ventes massives d'action ont donc lieu quelques jours avant le krach du fameux jeudi noir.Le matin, il ne se trouve presque pas d'acheteurs, quel que soit le prix, et les cours s'effondrent. À midi, l'indice Dow Jones a perdu 22,6 %. Puis le Lundi 28 elle en perd plus de 13 % et le jour suivant plus de 16 millions d'actions sont vendus ce jour alors qu’en moyenne ne sont vendus que seulement quelques 3 millions d'actions par jours et le record précédent s’élevait a 8 millions d'actions en un jour. L'ensemble de la bourse est donc touchée par un effet de dominos. La perte de confiance due à la crise boursière affecte la consommation et les investissementslors des mois suivant le krach. Les investisseurs qui ont spéculé en empruntant ne peuvent plus rembourser et causent des pertes sèches, ce qui conduit les banques à restreindre leur crédit. Les grandes entreprises connaissent alors des difficultés de trésorerie croissantes. Les plus faibles font faillite, ce qui accroît la fragilité des banques.
Les épargnants paniquent et se précipitent auprès de leur banque pour retirer leur argent. Ce krach
boursier de 1929 stoppa net cette forte croissance des États-Unis et marque ainsi la fin de « l’ère »
des Roaring Twenties en démontrant également la fragilité de cette période justement provoquée par
sa trop forte croissance.