II. Nouvelles sociétés, nouvelles cultures

16/12/2014 10:16

 

1) Quelle est la place de la femme dans cette nouvelle société ? 

  • L'évolution de leur place

Les femmes commencent à vivre dans des foyers équipés d’un plus grand confort, simplifiant considérablement le travail domestique. Les années 1920 entraînent un début de libération des mœurs : recul de l’âge moyen de mariage, augmentation des divorces ; sans pour autant menacer directement le schéma familial traditionnel : « le home est toujours le fondement de la société américaine »

Une question se pose alors aux femmes des années 1920, faut-il privilégier le travail ou la maison ? En fin de période, elles sont 10 546 000 sur le marché du travail. Finalement la population active féminine varie faiblement sur la période. Les femmes occupent en général des activités nécessitant un faible niveau de diplôme et à niveau de responsabilités peu élevées : travaux domestiques et de service, ouvrières peu qualifiées, employés de bureau… Les salaires féminins demeurent en outre largement inférieurs aux salaires masculins. En 1929, pour le même travail, une ouvrière gagne 40 cents à l’heure contre 62,5 pour un ouvrier. « Les femmes sont encore considérées sur le marché du travail comme offrant une main d’œuvre dont la concurrence est déloyale », discours que la Grande Dépression après la crise de 1929 ne fera que renforcer.

À défaut d’une parité salariale, les femmes obtiennent gain de cause en termes de parité politique : en 1919 le XIXe amendement accorde aux femmes le droit de vote aux élections.   Elles votent pour la première fois aux élections présidentielles et législatives de novembre 1920. La présence des femmes à des postes politiques se développe mais reste minoritaire et anecdotique. En 1931, la première femme sénateur est élue. De 1920 à 1932 : quatorze femmes ont siégé à la Chambre des représentants. 


 

  • La mode

Les femmes font également beaucoup attention à leur image, la mode pendant les années 20 va se développer et va rester dans les mémoires jusqu’à aujourd’hui. La mode prend son essor et la femme aisée de la classe moyenne découvre le rouge à lèvres, les escarpins, les bas de soies, les cheveux courts, les jupes moins longues. Les plus à la mode fument, boivent tout comme les hommes. La coupe garçonne devient d’ailleurs très tendance. Il y a une ambiguïté féminin-masculin dans beaucoup de leurs accessoires : chapeau melon, cravate, canne… Tout cela symbolise l’émancipation de la femme, la rébellion, l’indépendance. Malgré tout lorsqu’elle sort le soir elle reste très féminine en portant des robes et en se maquillant, l’important étant l’élégance. Pureté des lignes, effets décoratifs, jeux des lumières, dentelles, strass qui s’intègrent au vêtement pour mettre en valeur une femme libérée. Elles veulent bouger sans être gêner, d’où le raccourcissement de la jupe au dessus du genou. La femme qui danse bouge tout son corps de manière afro-américaine. La danse devient alors indispensable à la femme des années 1920. Ces danseuses étaient appelées  « clapets » en raison de leurs mouvements de battements de bras et de jambes comme des oiseaux. Les plus « délurées » d’entre elles étaient appelées « flappers ».

 "la femme se rebelle contre une beauté décidée par l'homme et détermine elle-même les attributs de sa beauté" Avant le XXe siècle, "l'homme codifieles canons" de la beauté féminine. "Il a encensé les belles, mais aussi les a enfermé dans des carcans et des prisons". "Menez une vie d'homme, mais restez femme". Extraite de Confidences en 1938, illustre cette tendance. 

Jusqu'au XXème siècle, le maquillage était considéré comme vulgaire ; effectivement il était, réservé aux filles prostituées, délurées, ou aux actrices. En 1920 pour certains, le maquillage est très proche du vice. Mensonge, dissimulation, malhonnêteté, impureté, duplicité, ruse, débauche... Tels sont les mots adoptés par ces critiques véhéments des femmes qui osent se farder. Remarquons toutefois que la levée de boucliers est essentiellement celle des hommes, craignant sans doute là une émancipation trop prononcée des femmes de leur entourage, épouses, filles, soeurs. Le véritable sacrilège n'est-il pas que les femmes se montrent, se distinguent, décident de ce qu'elles font de leur corps ? Elles manquent à leur devoir de rester discrète, de se faire petite et invisible, dans l'ombre de l'homme et à l'attente de ses désirs et de ses besoins. 

 

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2) Différentes cultures au coeur des années folles

a)      La danse et la musique

1.     L’ère du Jazz

 

On associe généralement le jazz à une jeunesse blanche. Le jazz, expression identitaire de l’homme noir, qui devient pour cette jeunesse le symbole de la modernité. Dans les années 1920, il y a une renaissance de ce style. En effet les restrictions de la guerre ont créé chez les blancs une « envie d’exotisme » et de rythmes enivrants…

Cette émergence d’une « culture noire » revisitée ne remet pas en cause pour autant le climat de ségrégation sociale et raciale à l’œuvre dans cette Amérique des années 1920. Les Etats-Unis découvrent une incarnation des vertus nouvelles qu’ils recherchaient, le noir américain, celui qui caractérise la sensualité, vitalité et créativité artistique. Cette « ère du jazz » qui fait fureur parmi les jeunes, ne fait pourtant pas l’unanimité. Vue comme le déclin de la décence des plus jeunes, accompagnant des danses où les jeunes femmes ne sont plus chaperonnées, les générations plus anciennes voient ces nouveaux musiciens comme des « dégénérés ». Cet engouement a permis de faire vivre les artistes africains du spectacle et du jazz ! Les cabarets s’installèrent à Broadway dans la fin des années 20, à cause de la prohibition entre autre.

 Le trompettiste Louis Armstrong, le cornettiste King Olliver, les clarinettistes Jimmie Noone et Johnny Dodds, le pianiste Duke Ellington sont élevés au rang de stars de ces nouveaux genres musicaux inspirés des chants des esclaves Noirs. Le « style Nouvelle-Orléans » fait fureur aussi bien dans les populations noires du sud du pays en exil économique au Nord que dans les populations blanches huppées.

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« Conçu, illustré et édité par Robert Nippoldt, ce livre qui a été récompensé par de nombreux prix, rend hommage à cette époque exceptionnelle, à travers un mélange stimulant d’illustrations, de faits et d’anecdotes amusantes, présentant 24 figures phares de la scène de jazz new-yorkaise des années 1920, dont on peut apprécier quelques-uns des meilleurs morceaux grâce au CD qui accompagne l’ouvrage. Les textes, écrits par Hans-Jürgen Schaal, offrent un aperçu vivant des clubs et des bandbattles, ainsi que des sessions d’enregistrements légendaires. Un véritable bonheur de lecture et d’écoute… et pas seulement pour les fans de jazz »

«Ce livre est un des objets d’art les plus originaux et les plus délicieusement inventifs consacrés au jazz depuis longtemps.»
— All About Jazz, Skopje, Macédoine

Jazz dans le New York des Années folles

Robert Nippoldt, Hans-Jürgen Schaal -Grands orchestres et grosses pointures de la scène jazz new-yorkaise des années 1920-

 

 

 

 

 

 

 

 

Joséphine Baker, illustrée ci-dessus, est une chanteuse, danseuse et actrice américaine, souvent considérée comme la première star noire. Elle est l’icône de la femme moderne. Sa première impression en arrivant à Paris fut cette délicieuse odeur de liberté : les hommes et les femmes s’embrassaient librement dans la rue, des photos de femmes nues étaient en vente libre sur le marché… Joséphine tomba amoureuse de Paris et de sa liberté. Si bien qu’elle décida en 1937 de prendre la nationalité française. À Paris, pendant les années 20, le prénom de Joséphine est synonyme de liberté. Tout le monde admire cette femme noire, et libre. Elle ose tout. Elle est très engagée politiquement : elle contribue corps et âme à la libération de la femme dans le monde et lutte activement contre le racisme. Elle devient même l’image de la libératrice de son sexe.

Dans Comoedia’ en 1925, on écrit de Joséphine : «Ce n’est plus la dancing-girl cocasse, c’est la Vénus noire qui hanta Baudelaire.» Elle atteint une notoriété internationale.
Pendant la 2e Guerre Mondiale, elle soutient le moral des troupes françaises en se produisant avec Maurice Chevalier sur la ligne Maginot. En 1974, André Levasseur imagine un show fantastique retraçant sa vie : son enfance, la « Revue Nègre », son engagement dans la Résistance, etc. Ce fut un réel succès. Joséphine était devenue une légende. 

Maurice Chevalier est également une icône de son siècle. Il est le symbole du rêve américain, le fameux «American Dream».

MauriceChevalier C’est la réussite d’un homme du peuple grâce à son travail acharné dans la musique. Celui décide d'aller faire carrière aux USA, à Hollywood. Il crée un tube qui va le faire connaître "Living In the Sunlight, Loving In the Moonlight". Pendant la deuxième guerre mondiale, outre le fait de chanter en duo avec Baker, il va chanter pour les troupes sur le front de l’est de nouvelles chansons dont D’excellents Français’dans laquelle il décrit une France unie contre l’envahisseur nazi. 

Il reste une légende et a même le droit à son étoile sur l’Allée des Célébrités d’Hollywood.

 

 

2. Le Blues

Vers 1920, une grande migration des noirs américains des Etats du sud, qui montent vers le nord. Ils sont chassés par la ségrégation et ont un expoir de pouvoir travailler avec un salaire meilleur dans l'une des grandes industries américaine du nord des Etats-Unis. "La route du blues" apparait: c'est le chemin parcouru entre la Nouvelle-Orléans et Chicago, passant par Memphis et Saint Louis. Nombreux d'entres eux restent dans le Delta du Mississipi et le blues est différencié "le blues rural" - la musique dure et intimiste dont les thèmes récurrents sont l'alcool, la souffrance, les catastrophes naturelles qui ravageaient le coton- et "le blues urbain" où les chanteurs sont accompagnés d'orchestres complets (basse, piano, batterie, guitare, cuivre).

Également dans les années 20 et 30, l’industrie du disque voit le jour et avec elle les «race records» (musique raciale destinée seulement au public afro-américain), mais certaines grandes chanteuses de blues arrivent tout de même à séduire le grand public et connaissent une popularité impressionnante, comme Gertrude « Ma » RaineyBessie SmithIda Coxet Victoria Spivey. Les maisons de disques décident alors d’envoyer des éclaireurs dans le sud, refaisant « la route du blues » à l’envers afin de dénicher de nouveaux talents. Le blues installe ses règles et s’enrichit de rencontres. C'est plus tard, dans les années 30 et 40 que le Blues prend vraiment son sens, et qu'il apparait comme un nouveau style musical, qui va se faire connaître dans le monde entier.

D'autres styles musicaux se développent pendant cette période au Etats-Unis. Mais, rien de préci n'a été prouvé on ne peut donc approuver que les autres styles musicaux étaient vraiment connus, et avaient leur place au sein du podium des danses et de la musique : le reste est venu après.

 

b) La littérature et les arts

 
La peinture américaine des années 1920 surfe sur le réalisme et le naturalisme avec des artistes comme Edward Hopper ou Charles Burchfield. La sculpture se prend de mégalomanie et de gigantisme avec le lancement du projet du Mount Rushmore National Memorial en mars 1925 dans le Dakota du Sud : il s’agit de sculpter dans la roche les visages des pères de l’Amérique : Georges Washington et Abraham Lincoln (qui seront par la suite rejoints par Théodore Roosevelt et Thomas Jefferson). Un projet fou qui doit s’étendre sur une surface de plus de 5 km2 : projet dont est chargé le sculpteur Gutzon Borglum.
La littérature des années 1920 est profondément marquée par l’avènement de jeunes auteurs qui formeront la « Lost Generation » : la génération perdue. Leurs ouvrages traduisent les doutes et la perplexité de cette génération ; Des auteurs comme Théodore Dreiser, Sherwood Anderson, Francis Scott Fitzgerald, King Lardner, Erskine Caldwell, James Branch Cabell en sont des éminents représentants. John Dos Passos et Ernest Hemingway développent dans leurs livres l’idée d’un dégoût de la guerre. Sinclair Lewis obtient le Prix Nobel de Littérature en 1931 avec « Babbitt » publié en 1922. 
 
 

 c) Le cinéma

Les années 1920 aux États-Unis correspondent au début de l’âge d’or Hollywoodien. On peut dès lors parler « d’Industrie Hollywoodienne » : Hollywood produit 700 films par an et inonde le marché mondial : les trois quarts des films diffusés à l’étranger sont américains en 1926. C’est l’époque de la création et du développement de grand « Companies » : des sociétés de productions cinématographiques : Paramount (1912), MGM (1924), Warner Brothers (1923), United Artists (1919). 

S'il se développe, c’est aussi grâce à un marché intérieur florissant : le cinéma devient une pratique culturelle de masse : le territoire est équipé de près de 1920 000 salles en 1929. En 1930, 80 % des Américains déclarent aller au cinéma une fois par semaine . Les films de Charlie Chaplin, star du cinéma muet, comme « la Ruée vers l’or » en 1925 connaissent un franc succès.

 

Le cinéma muet a été l'expression marquante et fascinante des trois premières décennies du vingtième siècle. Cette curiosité visuelle, baptisée cinématographe, à laquelle les scientifiques de l'époque prédisaient peu d'avenir, et qui la considéraient comme une curiosité ou une attraction foraine, est devenue le 7ème Art. Le cinéma muet est considéré par certains comme les années d'innocence voire même d'insouciance du 7ème Art.

Après plus de 30 ans d'existence, durant lesquelles il n'a cessé de charmer son public avec ses images vivantes, le septième art va désormais séduire le monde avec la mélodie de ses musiques comme de ses mots. Expérimentées dès l'invention du cinéma, les techniques sonores ne commencent à être exploiter qu'au milieu des années 1920, lorsqu' est constatée une légère baisse de la fréquentation des salles obscures. Le premier film véritablement parlant de l'histoire du septième art est Le chanteur de jazz. Ce changement se révéla rapidement fructueux, et, en 1930, les spectateurs s'émerveillent en entendant, de plus en plus souvent résonner dans les salles, la familière mélodie du langage.

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« Le monde alors tournait plus vite et brillait avec plus d’éclat.

Il vibrait d’enthousiasme et […] toute la vie n‘était que fantaisie.

C’était l’époque de l’espérance… l’époque de l’émerveillement… 

Mais c’était surtout l’époque du romanesque. » 

- The Great Gatsby

 
Gatsby Le Magnifique, en anglais The Great Gatsby, est le troisième roman de Francis Scott Fitzgerald, un écrivain américain né en 1896 et mort en 1940. 

Le roman a été publié aux Etats-Unis en 1925.

Un résumé du fameux roman, retraçant parfaitement les années folles :

"Raconté par un voisin devenu son ami, le roman tourne autour du personnage de Gatsby, jeune millionnaire charmant au passé trouble qui vit luxueusement dans une villa toujours pleine d'invités. Par certains aspects, le livre peut paraître une critique complexe de la bourgeoisie, de son opulence et de sa superficialité, où chaque personnage est prêt à tout pour parvenir à ses fins.

Nick Carraway, un jeune homme américain du Middle West atteignant la trentaine, se rend à New York pour travailler dans la finance comme agent de change. Par hasard, il trouve à louer une petite bicoque à Long Island, zone résidentielle très huppée et snob de la banlieue new-yorkaise. Sa demeure, presque invisible, est située dans West Egg entre deux énormes et luxueuses villas. De là, la vue est imprenable sur East Egg, l'endroit le plus cossu et sélect de toute la zone. C'est là qu'habitent Daisy, sa cousine germaine, et le mari de celle-ci, Tom Buchanan, issu de la même promotion que Nick à l'université Yale.

Nick se rend un soir chez les Buchanan, sur invitation de Daisy. Tom, beau et riche colosse, mais quelque peu bourru, paraît végéter auprès de Daisy, laquelle semble tout autant s'ennuyer avec son mari. Elle passe le plus clair de son temps avec son amie Jordan Baker, joueuse de golf professionnelle.

Tom, peu de temps après, demande à Nick de l'accompagner pour lui présenter sa maîtresse, Myrtle Wilson, la femme d'un garagiste sur la route qui relie New York à Long Island. Nick, témoin de l'inconstance de Tom, de l'enlisement du couple qu'il forme avec Daisy, n'aurait guère d'intérêt à fréquenter les Buchanan s'il n'y avait le rapprochement de plus en plus sensible avec la belle Jordan. Celle-ci s'étonne qu'il ne connaisse pas Gatsby puisqu'il habite West Egg, comme elle, et qu'on ne parle que de cet homme à la richesse fabuleuse.

Gatsby, justement, c'est son voisin. C'est lui qui possède l'immense maison (inspirée de Beacon Towers) très animée qui occulte celle, misérable, de Nick. Gatsby donne fréquemment des réceptions somptueuses qui accueillent des centaines de convives. Mais qui est Jay Gatsby ? D'où vient-il ? Que fait-il ? Les rumeurs les plus folles circulent sur son passé et sa fortune, même au sein de sa propre maison. C'est ce que Nick brûle de découvrir lorsqu'un jour il reçoit une invitation pour passer la soirée chez Gatsby. Une incroyable histoire va lier Nick, Tom, Gatsby, Jordan, Myrtle et Daisy pendant cet été 1922…"

Monica Randall, The Mansions of Long Island's Gold Coast
 
 
 
Gatsby Le Magnifique a été retranscrit au cinéma une première fois en 1974. Réalisé par Jack Clayton, il connut un grand succès à l'époque. Ce film fut interprêté par Robert Redford, Mia Farrow, Bruce Dern...
 
 
Au XXIème siècle, la même histoire ressort au cinéma, c'est un  film dramatique australo-américain écrit, produit et réalisé par Baz Luhrmann, sorti en 2013. Les principaux acteurs sont Leonardo Di Caprio, Tobey Maguire, Carey Mulligan, Joel Edgerton et Isla Fisher. 
Baz Luhrmann s’intéresse donc à la société des patriciens et des parvenus de New York dans les années 1920, à cette débauche de fêtes, à ce gaspillage hystérique dans les palais de Long Island avec la splendeur des demeures, des voitures et des jardins, tout un cadre de vie surdimensionné pour l’épate et la mise en scène bruyante d’une réussite.
 L’argent, comme le champagne, coule à flot sur les musiques de l’âge du jazz, l’ostentation est permanente sur fond de tripot et de corruption. Excessive et vulgaire, cette classe de riches court à sa perte, la mort rôde déjà dans la friche urbaine. Luhrmann anticipe ainsi le krach de 1929 : sous les feux d’artifice, la fragilité et l’éphémère, sous les mondanités, le cynisme.
 Bien que le film de Luhrmann soit largement éreinté par la critique pour l’évidente raison que nul n’y retrouve la subtilité soyeuse du roman, la version du metteur en scène australien ne manque pas de qualités.
 Sa cohérence d’abord : New York, Wall Street, la pointe de Manhattan au cœur du système continuent de nos jours d’exercer un pouvoir démesuré. D’où la fascination, car les années folles et l’aujourd’hui clinquant se ressemblent diablement. Le spectaculaire des soirées s’inspire des comédies musicales, des cabarets et des revues extravagantes telles les Ziegfeld Follies, car Luhrmann privilégie le grand spectacle : effets spéciaux, panoramas, costumes, aquarelles de la baie, tout concourt à la fulgurance du météore.
Le roman de Fitzgerald se termine par l’évocation de l’émerveillement des premiers marins hollandais découvrant le Nouveau Monde, et cet émerveillement se retrouve intact chez Luhrmann deux siècles plus tard : les aventuriers hollandais et le cinéaste australien abordent un continent qui les fascine.
Il serait tentant de dire que le cinéma reprend sur un grand pied les beuveries et les soirées de Fitzgerald lui-même lors de ses deux années de résidence à Long Island de 1922 à 1924, qui se précipite dans le tourbillon et la folie des grandeurs de l’époque. Délicatesse de l’acteur, excès du jeune Fitzgerald, vertiges du cinéma, le magnifique personnage de Gatsby se prête à toutes les fantasmagories, d’un siècle à l’autre.